Burundi news, le 26/04/2010
On ne trahit pas la confiance du peuple impunément!
Par NZIBAREGA Bernard
Au lendemain du pseudo scoop du CNDD-FDD qui, par la bouche de son président, nous a révélé ( secret de Polichinelle) que Pierre NKURUNZIZA allait porter les couleurs de son parti au scrutin présidentiel du 28 juin 2010, il a plutôt montré à ses concitoyens et au monde que sa formation politico-militaire souffre d'un déficit démocratique aigu!
Son annonce a, en outre, fragilisé Monsieur Gervais RUFYIKIRI que les sages du parti avaient préféré à Pierre NKURUNZIZA et qui jouissait, pourtant, d'une certaine dose de sympathie à l'extérieur du CNDD-FDD. S'il se confirmait que lui et Jérémie NGENDAKUMANA se sont fait soudoyer par Pierre NKURUNZIZA pour lui céder la place de candidat du parti, la carrière politique de ces 3 « mousquetaires » aurait entamé le début de la fin, si du moins, ils ont encore un minimum de dignité, et compte tenu de la mutation des mentalités à laquelle nous sommes en train d'assister à l'occasion des ces élections de 2010. Pourquoi?
Selon que l'on analyse ce postulat sous l'angle de l'unanimité totalitaire, à la Staline, qui aurait caractérisé la désignation du candidat à la candidature au poste de Président de la République (le 24 avril 2010), ou que l'on se rappelle un précédent conseil interne des sages du parti (à une date antérieure) qui avaient peiné, on l'avait su, à dégager un leader (RUFYIKIRI Gervais) au-dessus de 32% des suffrages (NKURUNZIZA n'en ayant obtenu que 25%), on constate, dans les deux cas, que ce parti est en plein désarroi, en implosion ou en bout de souffle! (1)
Ses leaders seraient mieux inspirés de reprendre leurs esprits pour préparer plus sereinement une meilleure stratégie pour 2015, car pour 2010, je doute fort que leur Dieu (dont NKURUNZIZA n'arrête pas d'évoquer la volonté en sa faveur) puisse les sauver d'une défaite électorale cuisante. D'ailleurs ils ne s'en cachent pas, hors micros et caméras, bien évidemment. Mais personne n'est dupe en dépit du double show CNDD-FDD/NKURUNZIZA ! La réalité du citoyen burundais au quotidien est tout autre, loin d'être réjouissant et loin de la liesse apparente des militants de ce parti qui a profité éhontément de l'argent du contribuable pour nous présenter son champion. Le peuple démontrera, dès le 21 mai 2010 certainement, que NKURUNZIZA n'est plus son champion!
J'en veux pour preuves certains faits dont le pouvoir devra répondre un jour. Il s'agit, entre autres, du comportement de certains jeunes « IMBONERAKURE » qui s'amusent, avec la bénédiction de certaines autorités administratives, à terroriser d'autres citoyens pour leurs opinions politiques. Le démenti de Monsieur Ezéchiel NIBIGIRA, patron de ces jeunes n'a convaincu personne lors de sa conférence de presse du 24/04/2010, donnée le jour même de la désignation de Pierre NKURUNZIZA! Et que dire du comportement indigne du député Jean-Baptiste NZIGAMASABO (alias « GIHAHE ») du CNDD-FDD qui les organise, en toute impunité, en province de Kirundo, les escadrons des dits « Imbonerakure »?
Sous d'autres cieux, ce député aurait été déchu de son mandat parlementaire depuis longtemps.
Le candidat NKURUNZIZA le protège pourtant! Dans quel but? Probablement, parce qu'il est satisfait de ses services. Et rien qu'avec ce cas (qui est loin d'être isolé), il a le toupet de briguer nos suffrages pour un deuxième mandat! Nous prendrait-il pour des aveugles ou des déficients mentaux? Nous lui donnerons la réponse appropriée dès le 21/05/2010!
Le même candidat et président NKURUNZIZA a dû couvrir les 269 cas d'assassinats , rien que en 2009) dénoncés par le président de la LIGUE ITEKA, Monsieur Joseph NDAYIZEYE. Ces assassinats continuent et n'ont pas l'air d'inquiéter le candidat du CNDD-FDD, pas davantage les sauvages assassinats de Muyinga perpétrés, semble-t-il, par le Général NSHIMIRIMANA Adolphe, l'affaire Ernest MANIRUMVA, l'assassinat de Salvator SABIRIHO par le gouverneur de Kayanza, l'intimidation du président de l'OLUCOME, l'interdiction du noble projet PACAM plébiscité par les médias et par la population, les avantages des hauts-gradés de l'Armée et de la Police, sans parler des scandaleuses indemnités de fin de mandat votées par un parlement pour le moins goulu malgré le peu de moyens dont le pays dispose, etc....
Tous ces faits, dont la liste est loin d'être exhaustive, militent en faveur d'un vote-sanction massif contre le candidat NKURUNZIZA qui a cautionné tant de crimes au cours de son mandat. Il aurait tort de prendre ses compatriotes pour des masochistes, même s'il a le droit d'être sadique!
Autre fait choquant: la politique du pourrissement que pratique le trio CNDD-FDD, FRODEBU et UPRONA à l'égard du monde de l'éducation de notre jeunesse témoigne de l'incapacité pour ne pas dire l'incompétence de dirigeants usés par le pouvoir qu'ils n'ont pas su bien exercer! On peut légitimement se demander si les autorités actuelles de notre pays mesurent la gravité de la situation dans laquelle elles semblent prendre plaisir à précipiter toute la nation. Leur devise semble être: « Après moi le déluge »!
Puisque ce trio au pouvoir semble avoir fait son temps (sachant que le CNDD-FDD s'est usé beaucoup plus vite que les 2 autres, ce qui, soit dit en passant, est très révélateur de l'absence de leadership ou de vision politique), il sera bientôt libéré car les électrices et les électeurs vont les renvoyer dans l'opposition pour se refaire une santé!
On ne trahit pas la confiance du peuple impunément!
J'ai lu, avec intérêt, les propos du Premier Vice-Président qu'il a tenus au micro de Antoine KABURAHE et Guibert MBONIMPA de « Iwacu ». A la question: « Le climat politique actuel vous semble-t-il propice à des élections libres, apaisées et transparentes? », Monsieur Yves SAHINGUVU a répondu: « (…..). Nos amis de la Communauté Est-africaine, de l'Union Européenne et les bailleurs de fonds multilatéraux et bilatéraux nous demandent de réussir cette étape importante. Nous n'avons donc pas le choix. C'est d'ailleurs la meilleure voie pour consolider la paix, la sécurité et de conjurer définitivement un retour en arrière ». (2)
Ces propos sont tout simplement indignes d'une autorité de son rang. S'agirait-il d'une réussite par contrainte mais sans conviction? Je n'ose pas m'imaginer qu'il cautionnerait l'idée du président NKURUNZIZA entendue sur la Radio ISANGANIRO (3) que « élections ou pas, ça ne changerait rien! » Il sait pertinemment que tout élu politique sérieux devrait s'imposer, à tout moment, le choix de servir celles et ceux qui l'ont élu au lieu de les oublier jusqu'au scrutin suivant, tout en se servant copieusement.
Malheureusement, force est de constater que la majorité des élu(e)s de 1993, comme de 2005 ont choisi de se servir (et avec quelle générosité, s'il vous plaît, pendant que la population de Kirundo meurt de faim et la population, dans tout le pays, croupit dans la misère noire. Cette même population a l'opportunité, dès le 21 mai 2010, de choisir de dignes représentants pour améliorer son sort. Elle n'a pas la mémoire courte comme certains de nos politicards!
On ne trahit pas la confiance du peuple impunément!
Si les élus faisaient correctement leur boulot d'élu, ce débat serait sans objet et Monsieur SAHINGUVU n'aurait pas à oser une telle affirmation fataliste, surtout que l'UPRONA (la famille politique dont il se réclame) porte une lourde responsabilité dans les malheurs qui se sont abattus sur notre pays depuis la disparition du Prince RWAGASORE. Et Monsieur Yves SAHINGUVU devrait s'en souvenir et ne pas fermer les yeux, comme son supérieur actuel à la tête de l'état, sur des faits très graves (assassinats, justice inefficace car sous tutelle) générateurs d'insécurité, d'injustices, de nombreuses violations flagrantes des droits de l'Homme attribués à son gouvernement.
Non, on a toujours le choix, mais il vaut mieux faire de bons choix plutôt que le contraire. Les mauvais choix se payent toujours tôt ou tard, et souvent très cher. Que les responsables des 3 partis au pouvoir depuis 2005 ne l'oublient pas. Nous, on ne peut pas l'oublier: le pouvoir nous le rappelle tous les jours.....: divers actes d'injustice, d'intimidation voire de terrorisme commis ici et là par des responsables du pouvoir en place et dont le gouvernement NKURUNZIZA ne saurait se dédouaner à bon compte!
Dans ses discours récurrents et de confusion des genres, le candidat NKURUNZIZA a encore confondu l'auditoire de son parti avec le peuple burundais dont la majorité n'est encartée dans aucun parti politique. Il aurait déclaré à ses militants qui venaient de le désigner (par acclamation et non par vote à bulletins secrets): « Vous venez de placer votre confiance en moi,... je promets devant vous et le Dieu Tout-Puissant d'user de toute ma force pour développer le pays ». (4)
Et pour enfoncer le clou, il aurait ajouté: « C'est Dieu qui a la première place dans notre parti. Et comme Dieu l'a fait en 2005 quand nous avons été élus, personne ne peut empêcher sa volonté de se réaliser une nouvelle fois »! (5)
De tels propos prêteraient à sourire s'ils ne traduisaient pas un mépris envers le peuple burundais et ne dissimulaient pas un plan, à peine voilé, de vouloir se faire élire par la terreur, à en juger par une distribution discrète d'armes à des militants et sympathisants présumés du CNDD-FDD aux fins d'enclencher, le moment venu, des assassinats ciblés contre des leaders et/ ou militants politiques de l'opposition (6). En général lorsqu'un parti au pouvoir a peur de l'opposition et qu'il se livre à des actes de terreur à son encontre, c'est qu'il n'a pas de programme politique. Ne serait-ce pas le cas pour le CNDD-FDD? Charge à Pierre NKURUNZIZA de démontrer, par des actes clairs, qu'il est crédible et qu'il a de l'autorité. En effet, jusqu'aujourd'hui ses discours semblent plutôt peu rassurants!
C'est ce genre de discours qui éclairent mieux la ritournelle de Pierre NKURUNZIZA, encore Président de la République et patron du Conseil des Sages au CNDD-FDD, selon laquelle les élections de 2010 vont bien se dérouler. De part la volonté de Dieu (entendez par là NKURUNZIZA lui-même).
Pourtant, si le Président respectait ou aimait son peuple, il saurait que le Dieu des élections, pour utiliser son langage, c'est le peuple souverain qui exerce sa volonté en se choisissant des représentants en qui il place sa confiance. Et il garde le privilège de remercier celles et ceux qui l'ont trahi. Il n'a pas hésité à chasser l'UPRONA du pouvoir en 1993; il a « viré » le FRODEBU en 2005 et il se prépare très probablement à faire subir le même sort au CNDD-FDD en 2010, pour ne pas faire de jaloux! Seuls des dirigeants d'une génération nouvelle ont des chances de se faire élire, y compris pour occuper le fauteuil présidentiel!
On peut parier qu'aucun des 3 candidats du trio au pouvoir en place ne sera élu en 2010 comme Président de la République. C'est plutôt au changement que le peuple burundais aspire pour mettre fin à l'impunité et autres maux du même acabit.
Le candidat NKURUNZIZA doit faire attention à ne pas continuer à tout confondre: il est encore président de tous les Burundais avant d'être candidat aux élections présidentielles. Il est le premier comptable de tous les crimes politiques, économiques, financiers, sécuritaires, sociaux qui cachent mal sa couverture de l'impunité que le parti CNDD-FDD s'était, semble-t-il, engagé à éradiquer. Et le peuple ne va pas se faire avoir une deuxième fois!
S'il veut être crédible, le candidat NKURUNZIZA a le devoir de s'engager solennellement à désavouer, faire arrêter puis faire juger équitablement tous les éléments de son parti qui ont préparé, semble-t-il, un plan de guerre et d'actes de terrorisme, en cas de défaite du CNDD-FDD dès le 21 mai 2010. S'en abstenir voudrait dire qu'il en est le commanditaire principal, auquel cas l'histoire retiendrait de lui que c'était un fossoyeur de la démocratie burundaise. Mais le parti présidentiel a encore la possibilité de quitter le pouvoir sans ajouter de mal au mal.......
On ne trahit pas la confiance du peuple impunément!
Le peuple, les forces vives de la nation, la société civile, les forces de sécurité publique, la communauté religieuse (dans sa diversité) tous aspirent, dans leur majorité, à la réussite de tous les scrutins de 2010, quel qu'en soit le parti vainqueur! Il vaut mieux que tous les candidats intègrent cette idée!
Et si le parti CNDD-FDD dont aucun Dieu ne peut imposer la victoire au détriment du peuple, unique détenteur et source de tout pouvoir démocratique, venait à contrecarrer la volonté du peuple, NKURUNZIZA, SAHINGUVU et tous les hauts responsables du pouvoir en place auraient à en répondre devant le peuple et devant la justice. Les jours du règne de l'impunité sont comptés: le candidat NKURUNZIZA comme tous les autres candidats doivent s'y engager sans équivoque ou ne pas se présenter aux élections de 2010!
Ce n'est pas parce que tous les pouvoirs qui se sont succédé jusqu'aujourd'hui l'avaient institutionnalisée que nous devons céder à un fatalisme injustifiable, surtout que le « culte du chef » nous a causé tant de torts. A cet égard, et c'est plutôt une bonne nouvelle, 6 ou 7 des candidats déjà en lice pour le fauteuil de Président de la République ont déjà affirmé haut et fort leur détermination à mettre fin à ce cancer qu'est l'impunité.
Le peuple burundais les met cependant, en garde: le temps des fausses promesses est révolu. A bon entendeur, salut! Le peuple est en train de payer très cher le choix de 2005 et il n'est pas prêt à retomber dans le même panneau en 2010!
Nos élu(e)s « promotion 2010 » à tous les échelons se doivent d'être différent(e)s de leurs prédécesseurs. D'ores et déjà nous exigeons d'eux/d'elles de s'engager à modifier la constitution dans le sens des intérêts des électeurs et électrices que nous sommes. Nous leur exigeons de nous rendre des comptes, à intervalles réguliers, afin de nous assurer qu'ils/ elles ne sont pas en train de tomber dans les travers du passé, pour que, enfin, le Burundi, débarrassé définitivement de ses vieux démons, vive en paix et se développe harmonieusement, au profit de tous ses enfants.
On ne trahit pas la confiance du peuple impunément!
(1) Voir « Burundi news » en sa livraison du 21/03/2010: « Le Conseil des Sages du CNDD-FDD a bel et bien voté pour la candidature de Rufyikiri »
(2) Voir « bujumbura news » en sa livraison du 24/04/2010: « A coeur ouvert avec Yves SAHINGUVU »
(3) Questions des auditeurs de « Radio Isanganiro » au Président le 19/04/2010
(4) Voir « bujumbura news » en sa livraison du 25/04/2010: « Pierre NKURUNZIZA, candidat à sa succession »
(5) ibid. en sa livraison du 24/04/2010: « Pierre Nkurunziza désigné candidat présidentiel du CNDD-FDD »
(6) Voir « Burundi bwiza » en sa livraison du 24/04/2010: « Sécurisation des élections ou plan de négation de la morale »