Burundi news, le 16/06/2015

Tuez-nous, peu importe l’histoire nous absoudra.

 Par Pierre Claver Nzeyimana

      Le peuple héroïque du Burundi vient de démontrer à la face du monde qu’on ne peut venir à bout de la détermination pour la lutte de ses droits inaliénables…et l’UA vient de démontrer encore une fois son incurie et son inutilité en refusant  toute assistance à un peuple en danger.

     En quoi est-ce que la lutte du peuple burundais est héroïque ? Il a compris à la suite du peuple burkinabé qu’il est le seul à se sortir des affres de la dictature. Pour la première fois depuis la lutte pour l’indépendance du Prince Louis Rwagasore, hutu et tutsi se sont unis pour une même cause, pour la première fois depuis très longtemps les habitants de nos collines ont publiquement manifesté contre un régime despotique, pour la première fois les manifestants dans tous les quartiers de Bujumbura ont offert leurs poitrines aux forces de la répression et à leurs fusils sans crainte aucune, pour la première fois les femmes urbaines et rurales se sont mobilisées et ont bravé les policiers prêtes à aller jusqu’au sacrifice suprême…. Pour la première fois enfin une diaspora de plus de 22 villes à travers le monde entier a également manifesté en diapason avec son peuple meurtri et lui a apporté un soutien massif multiforme.

Comment en est-on arrivé là ? Un hurluberlu qui corrompt tous ses proches y compris les opposants quand il ne parvient pas à les réduire au silence par la botte, un prétendu pasteur qui foule la constitution au pied tous les jours par son non-respect du caractère laïc de l’Etat, un voleur patenté qui vend tout bien de l’Etat pour renflouer ses caisses privées, un prévaricateur expérimenté qui depuis dix ans dilapide le peu de ressource minérale dont dispose le pays, un tricheur « constitutionnel » incapable de comprendre la différence entre un mandat et un mode de scrutin, un Chef de Gouvernement qui ne va en Conseil des Ministres juste que pour  « délibérer » sur des dossiers juteux (qui lui rapportent des sous) pour après, rapidement aller gambader sur un terrain de foot, un type incapable de se concentrer plus de deux heures et qui lorsque son ministre lui soumets un problème il l’invite à prier car Dieu va trouver la solution, etc. Les exemples sont à profusion sur la médiocrité du désormais potentat de Bujumbura et il est bien évident que le peuple ne pouvait continuer à se taire plus longtemps.

  Alors face à cela que propose le syndicat des Présidents africains abusivement dénommé Union Africaine ? Ou son petit frère l’EAC ? Rien ou presque rien…et c’est normal, l’inverse serait étonnant car derrière Nkurunziza se cachent Museveni, Kabila, Sassou, Biya, et bien d’autres arque boutés sur  le même prétexte (ou presque) pour briguer un nième mandat. Alors ils torturent leurs ministres des affaires étrangères pour qu’ils se creusent les méninges à inventer des formules qui ne condamnent pas Nkurunziza tout en n’approuvant pas son mode de gouvernement… Comment peut-on demander à un loup de négocier avec l’agneau ? De quoi vont-ils négocier ??  Comparaison n’est pas raison, mais tant qu’on y ait pourquoi n’a-t-on pas demandé à Hitler de négocier avec ses victimes ???? Museveni aurait dû négocier avec Idi Amin au lieu de le battre par les armes ???Le peuple burundais et Nkurunziza ont définitivement des intérêts irréconciliables. Louis-Michel a raison : Nkurunziza est disqualifié, même s’il truque ses élections et qu’il « gagne », son règne ne sera reconnu par personne. Une opposition qu’il a pourchassée, emprisonnée, exilée, torturée, divisée et même tuée ; une société civile martyrisée, une presse complètement anéantie et une milice armée de plus de 50.000 hommes dressée pour tuer tout opposant au 3 ème mandat et pour faire gagner Nkurunziza au forceps, des manifestations pacifiques réprimées dans le sang, à la kalachnikov, une police- milice qui n’est autre qu’une variante de la gestapo, une armée divisée et en voie d’ethnisation, une économie exsangue, ruinée et en lambeaux, une administration publique devenue fantomatique, voilà la réalité actuelle du pouvoir de Nkurunziza et l’UA ne propose que le dialogue et le consensus sur le calendrier électoral. Au demeurant si l’UA veut que Nkurunziza négocie avec l’opposition, les Chefs d’Etat n’ignorent pas qu’il s’est créé sa propre opposition taillée sur mesure : tous les partis politiques Nyakuri (Uprona, Frodebu, Fnl, etc..) et son 1 er Vice-Président et c’est avec eux qu’il va négocier…

 

Qu’aurait du décider l’EAC et à sa suite l’UA ?

1)      Que Nkurunziza ne rêve même pas de briguer un troisième mandat et qu’il attende sagement de terminer son terme le 26 Aout 2015 (ou une autre date), jour de passation de pouvoir avec son successeur.

2)      Que les partis politiques présentent leurs candidats aux présidentielles, législatives et communales, après le désarmement complet des imbonerakure, le retour de tous les exilés politiques et des refugiés ; la libération de tous les manifestants et de tous les prisonniers politiques et d’opinion ; la réhabilitation des medias (reconstruites et rééquipées par l’Etat) ; le vetting de la police et surtout du service national de renseignement ; le démantèlement de la garde présidentielle et le reversement de ses éléments dans le corps de l’armée ; la purge de la magistrature de tous les corrompus à la solde de Nkurunziza.

3)      [Comme il est évident que tous ces changements ne peuvent pas avoir lieu avant le 26 Aout, jour de départ officiel de Nkurunziza,] à partir du 27 Aout, la Cour constitutionnelle déclare la vacance de poste de Président de la République, et ipso facto le Président de l’Assemblée Nationale assure l’intérim. La Cour Constitutionnelle constate un cas de force majeure pour organiser les élections endéans 3 mois et l’autorité intérimaire a les coudées franches pour mettre en place un nouveau calendrier électoral et une nouvelle commission électorale.

4)      L’EAC et l’UA plaideraient alors pour la reprise de la coopération bilatérale et multilatérale et un plan Marshall pour le Burundi 

 

Ce n’est qu’une ébauche d’idées de sortie de crise couchée hâtivement. Elle reste à murir.