Source : WWW.Frodebu.be

UNION INTERPARLEMENTAIRE

31-08-2008
COMITE DES DROITS DE L’HOMME DES PARLEMENTAIRES

BURUNDI
CAS N°BDI/35-MATHIAS BASABOSE
CAS N°BDI/42-PASTEUR MPAWENAYO
CAS N°BDI/44-HUSSEIN RADJABU
CAS N°BDI/45-ALICE NZOMUKUNDA
CAS N°BDI/46-ZAITUNI RADJABU
CAS N°BDI/47-PASCALINE KAMPAYANO
CAS N°BDI/48-MARGUERITE NSHIMIRIMANA
CAS N°BDI/49-NADINE NZOMUKUNDA
CAS N°BDI/50-BEATRICE NIBIMPA
CAS N°BDI/51-MARIE GORETH NIYONZIMA
CAS N°BDI/52-MOUSSA SAIDI
CAS N°BDI/53-THEOPHILE MINYURANO
CAS N°BDI/54-OMAR MOUSSA
CAS N°BDI/55-JESEPHINE MUKERABIRORI
CAS N°BDI/56- DEO NYABENDA
CAS N°BDI/57-GERARD NKURUNZIZA
CAS N°BDI/58-JEAN FIDELE KANA
CAS N°BDI/59-MARIE SINDARUSIBA
CAS N°BDI/60-FRANCOIS XAVIER NSABABANDI
CAS N°BDI/61-JEAN MARIE NGENDAHAYO
CAS N°BDI/62-ALINE NITANGA

Décision confidentielle adoptée par le Comité à sa 112ème session
(Genève 14-17 Juillet 2008)

Le comité,

Se référant au cas des parlementaires susmentionnés du Burundi dont le mandat a été révoqué le 5 juin 2008, comme exposé dans son rapport,

Considérant les éléments suivants versés au dossier :

Les parlementaires en question ont été élus en juillet 2005 sur la liste du parti CNDD-FDD, qui a obtenu la majorité des sièges à l’Assemblée Nationale ; au fil du temps, des dissensions internes se sont produites au sein de ce parti ; elles se sont exacerbées après le Congrès du CNDD-FDD ; le parti s’est trouvé divisé en deux, une aile soutenant le nouveau président du parti, M. Jérémie NGENDAKUMANA, et l’autre soutenant M. RADJABU ; les personnes concernées font partiez de ce dernier groupe ; à par Madame NZOMUKUNDA, ancienne Vice-présidente de l’Assemblée Nationale, et M. BASABOSE, tous deux exclus du parti, M. Kana et Mme SINDARUSIBA, les autres députés concernés ont tous démissionné du parti et ont continué à siéger à l’Assemblé Nationale sans étiquette.

D’autres partis politiques, en particulier le FRODEBU, également connu des dissensions ; c’est ainsi qu’un groupe de membres du FRODEBU s’est entendu avec les membres dissidents du CNDD-FDD pour s’abstenir de participer (régulièrement) aux travaux de l’Assemblée Nationale, qui ont ainsi été bloqués, le quorum nécessaire à la prise de décisions n’étant plus atteint ;

L’UIP, dans le cadre de son programme d’assistance au Parlement du Burundi, n’a pas ménagé ses efforts, avec les autorités parlementaires, pour trouver une issue à l’impasse et, après des consultations avec toutes les parties concernées, a soumis pendant une mission en mai 2008 une proposition visant à sortir de l’impasse.

Le 30mai 2008, le Président de l’Assemblée Nationale a adressé une lettre à la Présidente de la Cour Constitutionnelle ayant pour objet une « Requête en occupation inconstitutionnelle des sièges à l’Assemblée Nationale » ; à l’appui de sa requête de « statuer sur l’occupation inconstitutionnelle » des sièges occupés par les députés concernés, le Président a invoqué les articles 98 et 169 de la Constitution et une lettre du Président du CNDD-FDD lui demandant de saisir la Cour au sujet des personnes qui n’étaient plus membres du parti ; il a également fait valoir que « certaines personnes considèrent qu’un parlementaire démissionnaire de son parti perd automatiquement le droit de siéger, dès lors que ce droit n’est reconnu qu’aux élus pouvant justifier d’une attache soit à une liste indépendants, soit à une liste d’un parti politique ayant réuni un nombre de suffrages égal ou supérieur à deux pour cent de l’ensemble des suffrages exprimés » ;

Par son arrêt RCCB213 du 5 Juin 2008, la Cour déclare la requête recevable en vertu de sa compétence d’assurer le respect de la Constitution, y compris la Charte des droits fondamentaux, par les organes de l’Etat et les autres institutions (Article 228, tiret 2) et déclare inconstitutionnelle l’occupation des sièges par les personnes concernées ; dans son raisonnement, la Cour s’appuie notamment sur l’article 169 de la Constitution qui stipule que « les candidats présentés par les partis politiques ou les listes d’indépendants ne peuvent être considérés comme élus et siéger à l’Assemblée Nationale que si, à l’échelle nationale, leur parti ou leur liste a totalisé un nombre de suffrages égal ou supérieur à deux pour cent de l’ensemble de suffrage exprimés » ; elle relève notamment qu’on est « élu avant la législature et on siège pendant la législature » ; par conséquent selon la Cour, ils ne remplissaient plus aucune des conditions stipulées dans cet article : ils ne pouvaient siéger ni comme indépendants puisque la liste des indépendants n’avait pas obtenu deux pour cent des suffrages, ni comme membres du parti sur la liste duquel ils avaient été élus puisque ils n’en étaient plus membres ;

notant les dispositions constitutionnelles et légales suivantes :

Aux termes de l’article 149 de la Constitution, « le mandat des députés et sénateurs a un caractère national. Tout mandat impératif est nul. Le vote des députés et sénateurs est personnel » ;

L’article 156 (section1) de la Constitution dispose que « le mandat de député et celui de sénateur prend fin par décès, la démission, l’incapacité permanente et l’absence injustifiée à plus d’un quart des séances d’une session ou lorsque le député ou le sénateur tombe dans l’un des cas de déchéance prévus par une loi organique » (telle que la code électoral et le Règlement intérieur de l’Assemblée Nationale) ;

L’article 132 du code électoral se lit comme suit : « le mandat d’un député peut prendre fin avant sont terme normal, soit en cas de vacance constatée par suite de décès, de démission, d’inaptitude physique, d’incapacité permanente, d’absence injustifiée à plus d’un quart des séances d’une session, ou de déchéance consécutive à la perte d’une condition d’éligibilité ou à la survenance d’une cause d’inéligibilité… » ;

Au terme de l’article 15 du Règlement Intérieur de l’Assemblée Nationale, « le mandat d’un député prend fin, en cas de vacance constatée par suite de décès, de démission, d’inaptitude physique, d’incapacité permanente, d’absence injustifiée à plus d’un quart des séances d’une session ou de déchéance consécutive à une servitude pénale principale de plus de douze mois. Toutefois, aucune déchéance ne peut être prononcée lorsqu’il s’agit d’une condamnation pour des infractions non intentionnelles.» L’article 16 de ce même règlement stipule que « la vacance est constatée par un arrêt de la Cour Constitutionnelle statuant sur requête du Bureau de l’Assemblée Nationale» ;

Sachant que, selon des informations reçues par le Comité, il ressort des travaux préparatoires de la Constitution qu’une proposition visant à déchoir de son mandat un parlementaire qui aurait changé de parti politique avait été expressément écartée et remplacée par les dispositions constitutionnelles actuelles relatives à la fin du mandat parlementaire, qui ne prévoient pas la fin de ce mandat lorsque le parlementaire est exclu ou démissionne du parti sur la liste duquel il a été élu,

Considérant en outre que, selon l’une des sources, des mandats d’arrêt ont été décernés à MM. NKURUNZIZA, Nsababandi, Nshimirimana, Nyabenda, Basabose et Mpawenayo ; notant que ce dernier a effectivement été arrêté le 4 Juillet 2008 et que M. Nkurunziza a été arrêté par le Directeur adjoint de la Police le 15 Juillet 2008, apparemment sans mandat,

Notant qu’un groupe dissident de FRODEBU a créé un nouveau parti et que le Président de l’Assemblée Nationale, pour les motifs exposés plus haut, de demander à la Cour Constitutionnelle de déclarer également inconstitutionnelle l’occupation des sièges par les parlementaires dissidents ; que, cependant, le président de l’Assemblée Nationale n’a encore rien entrepris ; notant également qu’un dirigeant de ce nouveau parti a demandé au Président de l’Assemblée Nationale de révoquer 15 membres du parti FRODEBU su Parlement au motif qu’ils avaient été absents à plus d’un quart des séances de la session en cours et pouvaient par conséquent être révoqué conformément aux dispositions de l’Article 156 de la Constitution et de l’article 15 du Règlement Intérieur ; que l’application de ces disposition aurait des conséquences non seulement pour les 15 membres en questions du FRODEBU, mais aussi pour un certain nombre de parlementaire appartenant au CNDD-FDD et à l’UPRONA, qui ont également boycotté un nombre important de séances parlementaires,

remercie le Président de l’Assemblée Nationale de sa coopération et lui sait gré d’avoir envoyé la copie demandée de l’arrêt RCCB 213 de la Cour Constitutionnelle du 05 mai 2008 ;
sait que le Burundi a été confronté à une situation difficile, qui pratiquement empêché l’Assemblée Nationale d’atteindre le quorum nécessaire, et que les travaux parlementaires et gouvernementaux ont donc été interrompus au début de l’année ; reconnaît par conséquent qu’il y avait un besoin urgent de trouver une solution qui permette à l’Assemblée Nationale de reprendre le travail ;


félicite l’UIP de ses efforts visant à travailler avec toutes les parties concernées au Burundi pour trouver une solution négociée, globale et convenue aux problèmes que rencontre le Parlement, de manière à permettre à tous les partis et factions de participer de manière effective aux travaux de l’Assemblée Nationale ; regrette que ce processus ait été interrompu avant d’avoir abouti ;


rappelle que la révocation du mandat parlementaire est une mesure grave qui prive irrévocablement les parlementaires concernés de la possibilité d’exercer le mandat qu’ils tiennent du peuple et qui doit donc être prise en pleine conformité avec la loi et uniquement pour des raisons graves prévues dans la loi ;


exprime donc la vive préoccupation que lui inspire l’arrêt de la cour Constitutionnelle, qui ne tient compte ni des dispositions de la Constitution traitant expressément de la perte du mandat parlementaire, ni des dispositions pertinentes de la loi électorale ou du Règlement intérieur *, et ne fait pas non plus référence aux travaux préparatoires de la Constitution ou aux positions et arguments juridiques des parlementaires concernés ;


exprime en outre sa vive préoccupation quant au fait que des mandats d’arrêts auraient été décernés aux six personnes mentionnées plus haut et que deux d’entre elles auraient été arrêtées ; et souhaite être informé d’urgence des motifs légaux pour les ces mandats ont été décernés et des faits qui justifient cette mesure ;


prie instamment l’Assemblée Nationale et les autorités, compétentes de reprendre les négociations et demande à l’Assemblée de recevoir d’urgence la mission de suivi qui est prévue par l’UIP afin que cette dernière puisse de nouveau proposer ses bons offices à l’appui du dialogue politique qui seul peut apporter une solution durable aux problèmes qui sont apparus ;
charge le Secrétaire général de porter la présente décision à la connaissance des Présidents de l’Assemblée Nationale et du Sénat et décide de poursuivre l’examen de ce cas à sa prochaine session, qui se tiendra durant la 119ème Assemblée de l’UIP (Genève, octobre 2008), où il espère avoir la possibilité de rencontrer la délégation burundaise.

CONFIDENTIEL

Le Comité,
Saisi d’une plainte concernant les parlementaires du Burundi dont le mandat a été révoqué le 5 Juin 2008,
note que les communications ont été présentées en bonne et due forme ;

note qu’elles émanent des parlementaires concernés, sources qualifiées en vertu de la Section C.a) de la « Procédure d’examen et traitement, par l’Union Interparlementaire, de Communications relatives à des violations des droits de l’homme dont sont victimes des parlementaires » ;

note que les faits ont trait à la révocation apparemment illicite du mandat parlementaire des intéressés, question qui relève de sa compétence ;

note que les parlementaires concernés étaient membres en exercice du Parlement lorsque se sont produits les faits évoqués dans les communications ; note en outre qu’il examine les cas de MM. BASABOSE, MPAWENAYO et de Mme ZAITUNI RADJABU et Alice NZOMUKUNDA, en rapport avec un attentat dont ils étaient la cible et le cas de M. Hussein RADJABU, en rapport avec les poursuites engagées contre lui pour des charges de tentative de rébellion qui seraient montées de toutes pièces ;

estime donc la plainte recevable en vertu de la section A de la Procédure et se déclare compétent pour l’examiner.